corrida

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Description: 

sur la Galerie / empreintes j'ai mis une série sur la corrida. Je ne sais si ça convient ou si ça peut passer. à vous de voir. j'ai écrit aussi ce texte, pas seulement explicatif.

la corrida est un sujet polémique.
L'indifférence n'est guère possible, on est résolument contre ou inconditionnellement pour.
J'y suis pourtant allé dans le seul but de faire des photos.
J'ai connu dans mon enfance la mort des bestiaux en abattoir, mon père était boucher, mais il tuait les animaux avec respect, et le gamin que j'étais montait parfois sur le ventre de la bête pour faciliter la saignée.
Là où j'étais, il y avait corrida, j'y fus. En photographe et sans autre intention ni émotion, j'ai fait des photos.

Au premier degré, la mort d'une bête, érigée en spectacle, est une horreur sans nom.
Il faut pourtant avant de poser un jugement aller plus profondément dans l'analyse et la réflexion.

Tout se joue sur le sable.
Sous le soleil, le sable est d'or. Comme le sont les ciels des peintres primitifs pour signifier une espace sacré. Mais ici, ce n'est pas le ciel qui est sacré, mais la terre.
Dans un espace délimité, car le monde a ses limites et surtout le temps, qui est mesuré.
Le cercle de l'arène reprend la symbolique du ciel, mais aussi l'espace vital où s'inscrit le Destin auquel on ne peut normalement échapper.
Mais cet espace sacré n'a rien à voir avec le monde d'ici bas puisque le matador et le peuple qui le soutient s'approprient des droits de vie et de mort qui n'appartiennent qu'au Créateur, il s'agit bien d'une usurpation, hélas illusoire, temporaire, éphémère, scandaleuse, blasphématoire.
La corrida est une cérémonie religieuse avec son rituel, ses costumes, ses règles, sa liturgie propre. Comme toute religion, elle pose le rapport avec la mort, elle crie la révolte devant l'insupportable nécessité et l'orgueil de pouvoir la vaincre ou du moins de le tenter, de l'affronter au risque de tout perdre.
Avant de tuer le taureau, on l'adore. On lui a dressé des statues, parfois en or ; on l'admire pour sa force sauvage et brute, sa vigueur sans défaut, son puissant élan vital, sa beauté musculaire épanouie, son arrogance tranquille, sa certitude de vaincre, sa fougue irrésistible, sa majestueuse impétuosité...Il rassemble tout ce que l'homme jalouse et envie.
D'abord, on le vénère, ses statues sont couvertes de fleurs, on le mène en procession.
En attendant, le public est en vibration, avec le taureau ou contre le taureau, avec le matador ou contre le matador, avec le picador ou contre le picador. Le public est un, bruyant, unanime ; il siffle, chante, hue, crie, vocifère, tempête, suffoque d'indignation, halète de terreur, frémit de peur, s'agite, se lève et va pisser. Il y a des silences insoutenables, lors des premières passes d'observation entre le taureau et matador et des brouhahas invraisemblables comme des grondements torrentueux. Et la musique se déploie en communion d'émotion 
Et à la fin on se lève en agitant un mouchoir blanc, on applaudit. les jolies femmes jettent des fleurs, les hommes lancent leur chapeau, on honore de trophées le vainqueur du combat. On se croit beaux et forts. On se sent invincibles, indestructibles, immortels.
C'est ainsi dans l’arène : le temps d'un sacrifice, nous sommes maîtres de notre destin, nous ne craignons pas la mort, nous sommes qui nous sommes. La terre est à nous, le ciel attendra.
Taureau mon frère, tu n'es pas mort pour rien.

Pour cette exposition « Empreintes » j'ai seulement voulu garder quelques traces sur le sable, signes du combat que nous menons, inutile et vain puisque nous ne sommes que des ombres qui retournerons aussi à la poussière.

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