autoportrait aux injures
Avant, mais finalement il n'y a pas si longtemps ; il est arrivé qu'on me considérât comme un vieillard. Ça se lisait dans les yeux que j'étais vieux, et parfois même dans des propos. Je souriais doucement pour feindre d'y croire, mais je n'y croyais pas.
On me l'a répété plus souvent sans que j'y fasse plus attention.
Un jour, dans le tram, on m'a cédé la place. J'ai tout de suite affirmé : »mais si, tout va bien ! » avec un rictus d'incompréhension. Je ne le croyais toujours pas.
On m'a mis à la retraite, avec respect et considération, mais en pensant tout bas : « bon débarras ! », pourtant je restais incrédule.
Je filais les années, ça finissait par se voir. J'ai fini par le voir. J'ai fini par le croire.
J'eus droit à la compassion admirative hypocrite : « vous ne les faites pas ! », ça n'a pas duré longtemps.
Maintenant je suis vieux, plus besoin d'y croire, simplement je le sais.