discours expo NID

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Le Nid nous avait contactés pour célébrer leur 80° anniversaire.
Nous, c'est Imagora, un collectif de photographes.
On a accepté et vous avez ici le résultat.
Le projet, c'était de réaliser une expo photos, présentant des portraits de femmes. Nous avons proposé de travailler avec elles pour déterminer quelle était l'image qu'elles souhaitaient donner d'elles-mêmes. Il ne s'agissait pas de réaliser de belles photos, mais plutôt de bonnes photos c'est à dire en cohérence avec les intentions du Nid, les souhaits de ces femmes et notre liberté créatrice.

A vrai dire les débuts ont été plutôt difficiles. Pour nous c'était une nouvelle aventure dont on ne sait jamais au départ si ce sera réussi. Pour le Nid, c'était simple : faire valoir leur action en faveur des prostituées qui désirent s'en sortir. Pour les femmes du Nid, ça a été beaucoup plus compliqué. Il y avait beaucoup de réticences à vaincre sur un fond de bonne volonté nuancé d'une certaine méfiance, voire d'appréhension.

Tout a démarré, bien démarré, le jour où Nina s'est amusée comme une petite folle au cours d'une séance de prise de vue. Elle aime la nature, elle a une passion pour les poules, on lui a fait porter une robe réalisée pour l'occasion, un vrai bouquet de fleurs dont elle était le plus beau spécimen. Les barrières sont tombées. Pas toutes évidemment, il y a chez ces femmes trop de douleur, trop de rancœur accumulée et même trop de peurs à vaincre. C'est une véritable déchirure de rompre avec un passé désastreux, avec un destin écrasant et surtout avec cette étiquette qui vous colle à la peau et qu'on lit constamment dans le regard de l'autre.

Nous on ne s'est pas posé de questions, notre regard était seulement avec un regard de photographe. On travaille avec un objectif, 50mm, 80mm. L'objectif fait de ce qui est vu au travers un objet : seulement une attitude dans la lumière, pas de jugement et la seule envie de mettre en valeur celui ou celle qui pose, qui se pose. L'appareil photo objective, le regard du photographe au contraire réinvente le sujet. Ça a fonctionné.

Je crois que nos photos montrent des femmes admirables, c'est à dire qu'on peut regarder avec un regard simple, un regard attendri. Il y a même un peu de complicité, parce qu'entre elles et nous régnait la confiance. On n'attendait rien d'elles sinon qu'elles acceptent d'être regardées comme elles sont ou comme elles voulaient être regardées. C'est vrai que le regard de l'autre est nécessaire pour vous faire exister, il peut aider aussi à vous renouveler, ; si tu me regardes autrement et parce que tu me regardes autrement, je peux devenir un autre, une autre.

On a voulu garder quelques témoignages de leurs paroles. Quelques textes qui disent des choses simples : j'aime la vie, c'est ma fille qui ma sauvée, je suis comme je suis. Tout n'est pas dit, tout ne peut se dire. Mais l'essentiel est là : je veux être libre, je veux être moi, je veux être fière de moi. Et surtout je veux être reconnue comme telle.

On ne sait pas si tout est achevé, mais en tout cas, grâce au Nid et on l'espère aussi grâce à nous, elles sont sur le bon chemin. Le bon chemin, c'est bien sûr celui qu'elles ont décidé, elles, de choisir.